(zander) I think I want to live my life and you’re just in my way

Aujourd'hui sans savoir pourquoi, il y avait eu foule. Je n'avais pas arrêté de bouger dans tous les sens pour assurer un service décent. Beaucoup d'étudiants étaient venus boire un café après un cours – à ce que j'avais compris – ennuyeux. Ils faisaient des projets pour le prochain week-end, se demandant s'ils iraient au chalet près du lac. J'enviais leur liberté. Je n'avais jamais eu l'occasion d'aller passer un week-end hors de la ville. Les peu de choses palpitantes que j'avais fais dans ma vie, c'était en compagnie de Zander, qui s'était évaporé dans la nature. Sinon, j'avais souvent été enfermé entre quatre murs à attendre que le temps coule... lentement. Ma vie était certes plus palpitante depuis la naissance de Max mais on ne pouvait pas dire pour autant que je voyais des choses différentes du quotidiennes. Justement, le petit bonhomme avait décidé de jouer avec le train qu'il avait reçu lors de son dernier anniversaire, mettant des fausses rails à peu près partout dans le café. Cela avait fait beaucoup rire les clients, mais pour moi c'était devenu un sport de ne pas me prendre les pieds dedans. Peter le laissait faire, comme toujours. Il n'était pas loin de dix-neuf heures. Exceptionnellement on fermait ce soir. Les derniers clients partirent. Souriante, je leur souhaitais une excellente soirée. La porte se ferma et je tournais le carton pour indiqué que le café n'était pas ouvert. Je fermerais la porte une fois que je serai partie. Je me retournais voyant que j'avais beaucoup de vaisselle à ranger et il fallait que je fasse un brin de ménage avant de partir. Peter était assez pointilleux là-dessus. Je pris les différentes assiettes qui étaient sur les tables pour les mettre sur un plateau, ainsi que les verres. Max était en train de jouer avec son train et je l'entendais derrière moi. J'avais quand même hâte qu'il aille à l'école primaire pour qu'il se fasse des amis de son âge car il était quand même assez réservé. Je passais un coup de chiffon sur la table pour qu'elle soit bien propre et je pris le plateau. Reculant de quelques pas, je ne fis plus spécialement à l'environnement autour et je trébucha sur les rails. Je perdis l'équilibre, mes fesses atteignant précipitamment le sol, la vaisselle se brisant. « MAX ! » J'avais peut-être élevé la voix un peu fort. Je le vis partir en courant vers la réserve. Il fuyait toujours quand c'était comme ça. J'avais ma cheville qui me lançait. J'enlevais mes escarpins pour me masser la cheville endolorie en grimaçant. Je regardais le désastre autour de moi. Catastrophique. Je pestais, commençant à ramasser les débris de verre. J'en avais pour un petit moment. Un débris me rentra dans ma paume de main et je le lâchais. « Aïe ! » Comme si ça ne suffisait pas, je vis un filait de sang couler. Une ombre vint se poser en face de moi. C'était Peter. Qui pouvait venir au café alors qu'il était censé être fermé ? « Prends-le sur mon salaire. Je rembourserai tout. Sache juste que c'est pas de ma faute, c'est Max. Et en parti, ça peut être toi aussi. » Je n'avais relevé la tête, préférant continuer ma tâche.

La douleur était lancinante. Je regardais le filet de sang qui était en train de s'écouler de ma paume de main. On pouvait le dire à présent que c'était vraiment une mauvaise journée. Max était allé se réfugier dans la réserve. J'avais peut-être élevé la voix un peu fort, j'irai m'excuser mais en contre partie il devrait aussi présenter ses excuses et par la suite ne pas jouer au milieu du café. Une ombre s'était dessinée et je distinguais une présence en face de moi. Sans relever les yeux je me mis à parler, étant persuadée que c'était Peter. Il avait juste fallu deux ou trois mots pour que je comprenne que ce n'était pas du tout Peter. Je devais être tombée sur la tête et je devais être dans le coma. Oui, je ne voyais que cette possibilité pour que ce soit lui en face de moi. Zander ne pouvait pas être là. C'était tout bonnement impossible. Il était parti du jour au lendemain il y a quatre ans sans rien dire. Non, je devais vraiment m'être tapée la tête contre le carrelage. Il fallait que je me pince pour voir si c'était vrai. Il m'avait pris la main pour me soigner. C'était définitivement pas réel. Impossible. C'était le mot que je me répétais dans mon esprit. Si c'était une illusion, alors je pouvais... C'était parti tout seul, je l'avais repoussé et je l'avais giflé rapidement. A croire que ça me démangeait depuis son départ. Il m'avait blessé. Sauf qu'au vue de la douleur que je ressentis au niveau de mon autre main suite à cet acte je compris instantanément que ce n'était pas une illusion et qu'il était bien devant moi. Zander était là. L'information mis un moment à arriver à mon cerveau. « Je n'ai pas besoin de ton aide. » Fis-je en ne le regardant pas. Déjà j'avais un peu honte de l'avoir giflé, même s'il le méritait amplement. Deuxièmement, je ne voulais en aucun cas qu'il pense que je ne lui en voulais pas, je n'étais pas une cruche. Troisièmement... Je m'étais décomposée sur place. Si Max sortait, c'était fichu. Non, il ne pouvait pas l'apprendre comme ça. Non je ne voulais pas qu'il fasse souffrir Max comme il m'avait fait souffrir. Une tonne de pensées enivraient mon cerveau et j'étais à deux doigts de perdre mon calme. « Je me débrouille très bien toute seule. » Oui, bon ce n'était pas très évident quand on voyait le désastre qui s'était produit mais cela ne serait jamais arrivé s'il n'y avait pas un petit diable dans les parages. Je me relevais en grimaçant. Ma cheville était douloureuse mais je m'en moquais, hors de question de paraître faible devant lui. Il fallait que je lui montre que j'étais forte. Une partie de moi voulait fondre en larmes, mais il en était pas question. Il fallait que je nettoie tout ça. Le balai était dans la réserve. Ce n'était pas possible. J'avais l'air d'une parfaite idiote, debout sans bouger. J'étais comme coincée avec le destin et j'avais horreur de ça.

La tension était palpable. Je ne pensais pas que la journée aurait pu être pire, mais il fallait croire que je m'étais trompée. Je n'aurai jamais pensé qu'il pousse un jour de nouveau cette porte. Pendant un an j'avais espéré qu'il revienne, essayant de l'apercevoir à chaque coin de rue. En fin de compte, Peter m'avait dit de laisser tomber, qu'il ne reviendrait sans doute jamais et que je devais faire mon deuil de cet amour. Ce fut très dur. Je m'étais résignée au fait qu'il ne reviendrait pas, alors le voir présentement je me demandais si c'était une plaisanterie du destin, qui n'était franchement pas spécialement drôle pour le coup. Je l'avais repoussé et même giflé. C'était tout ce qu'il méritait. Il n'aurait pas pu expliquer la raison de son départ ? J'aurai peut-être compris, sauf si c'était pour retrouver une femme, là je n'aurai pas du tout compris et je l'aurai très mal pris. Je me demandais ce qui était pire: savoir ou être dans l'ignorance. Je lui déclarais clairement que je pouvais me débrouiller toute seule. D'un côté, j'avais bien été obligée d'apprendre à me débrouiller seule. Mise à la porte du domicile familiale, me retrouvant sans ressource du jour au lendemain. Je remerciais le ciel d'avoir créé Peter qui m'avait pris sous son aile. Je m'étais levée, essayant de camoufler tant bien que mal la douleur lancinante à la cheville. Il fallait que j'aille récupérer le nécessaire pour nettoyer dans la réserve mais il y avait Max. Je ne voulais pas qu'il se faufile entre mes jambes, je n'aurai même pas le temps de réagir et de le rattraper. Zander s'était appuyé contre une des tables du café. Donc il avait bien l'attention de rester un moment. Cela allait devenir un peu plus difficile. Il me demandait si c'était possible qu'on parle. Parler. Maintenant. Je ne m'étais pas préparée psychologiquement à ça, j'aurai même préféré fuir. « Tu veux parler ? » J'avais gardé ma voix assez calme, il ne fallait pas que je m'énerve. « Tu crois pas que tu aurais du parler avant de partir comme un voleur ? Je ne sais pas, cela est plus logique. » Je n'avais pas pu m'empêcher d'être sarcastique sur le coup. Oui je lui en voulais, énormément. Je m'étais retournée pour aller en direction de la réserve, finalement c'était un peu une solution pour fuir mais sa dernière phrase m'arrêta dans ma lancée. Désolé. Parce qu'il pensait que cela allait suffire à ce que je lui pardonne et à ce que je me jette dans ses bras ? C'était bien trop facile. Cela m'énervait et je sentais mes membres se crisper pour le coup. Je me retenais franchement d'être furieuse. Il fallait être mature, calme, posée. C'était plus facile à dire qu'à faire. Je me retournais de nouveau pour lui faire face, et même si j'avais beau cacher ma fureur, cela commençait à se dessiner sur mon visage. « Désolé ?! » Je sentais mes mâchoires se contracter. « Quatre ans. QUATRE ANS ZANDER ! » Okay, je n'avais pas réussi à me canaliser sur ce coup et ma voix était montée assez rapidement. Je respirais lentement pour me calmer. « Tu pars, tu disparais sans laisser de trace. Tu imagines la tête que j'ai tiré quand c'est ton voisin qui m'a annoncé que tu étais parti ? Tu imagines comment je me suis sentie quand je ne t'ai même pas vu revenir ? Que je pensais que tu étais juste parti quelques jours et qu'en fin de compte, tu n'es même pas revenu et là tu arrives ici, ce soir, au bout de quatre ans pour me dire que tu es vraiment désolé ? » Pendant mon petit discours je n'avais même pas vu que Max était sorti et que la petite tornade brune était passé derrière moi pour se réfugier derrière un comptoir. J'étais focalisée sur Zander, essayant de ne pas rentrer dans une colère noire à tout moment.

Par moment j'espérais que j'allais me réveiller et que ce n'était qu'un rêve, un cauchemar aussi. Je me rappelais du bon temps où l'on était ensemble où je me sentais vivre et heureuse, loin d'une vie de prisonnière dans une belle maison. Oui, tout avait changé quand il était parti. J'avais tout perdu, quasiment tout. Je m'étais retrouvée dehors du jour au lendemain dans une vie que j'aurai voulu mais qui n'était pas du tout ce que je pensais être. Quand je le regardais, oui, je ressentais de la colère. Je lui en voulais de m'avoir laissé au moment où j'avais eu le plus besoin de lui. J'étais partagée entre l'envie de fuir et l'envie de tout savoir. Or, une part de moi ne voulait rien savoir de peur d'être déçue. J'avais l'impression que c'était de ma faute s'il était partie, comme si c'était moi qu'il avait voulu fuir pour le coup. Peut-être qu'au final je ne lui avais pas convenu, qu'il était parti et qu'il avait fait sa vie ailleurs et que s'il venait aujourd'hui c'était juste pour me le lancer en plein visage. Je ne l'espérais pas. Une fois que j'avais commencé à exploser ma rage je commençais à sentir mon cœur se détendre. J'avais ça sur le cœur depuis quatre ans et enfin l'exprimer à haute voix devant le coupable cela provoquait une légère sensation de liberté. C'est alors que je vis qu'il observait quelque chose derrière moi mais j'étais bien trop occupée à régler mes comptes pour me retourner. Il me confiait à quel point il était désolé, de m'avoir fait subir tout ça. J'avais froncé les sourcils. « Tu ne sais pas ce que j'ai subi Zander. Loin de là. » J'avais eu un ton assez froid et j'avais serré mes poings. J'étais vraiment en colère. Certes, il pouvait être désolé, mais cela ne changeait strictement rien de ce que j'avais subi. Zander me déclara qu'il m'avait envoyé des lettres, mais qu'il doutait à présent de leur arrivée à bon port. « Quelles lettres ? » demandais-je assez perdue pour le coup. Je n'en avais reçu aucune pour le coup. Il n'avait pas fallu que je mette longtemps à comprendre pourquoi. Elles avaient du arriver chez mes parents, après l'épisode désastreux. « Je ne les ai pas reçues parce que j'ai été mise à la porte de chez moi. » Avouais-je en l'observant. A présent je me sentais comme une idiote. Je pensais qu'il m'avait oublié pendant quatre ans et savoir qu'il m'avait envoyé des lettres à chaque fois... J'avais une folle envie d'aller chez mes parents pour leur demander pourquoi ils ne me les avaient pas transféré. J'aurai eu la réponse : tu n'es pas notre fille. Ou alors quelque chose de plus méchant peut-être. C'était même fort probable. Il me confia que c'était pour son père. Là, pour le coup, je restais sceptique et cela pouvait même se voir sur mon visage. « Ton père ? » Demandais-je comme pour être sure de ce que j'avais entendu. « Tu m'as planté pour un homme qui n'était même pas dans ta vie ? » J'avais encore plus serré mes poings sur le coup tellement je me sentais blessée. Son père, il n'avait jamais été là à ce que j'avais compris et voilà qu'il partait quatre ans pour lui. Pour le coup je me sentais blessée. Blessée qu'il m'en avait pas parlé comme s'il n'avait pas confiance en moi. Il pointa le comptoir du doigt en me disant qu'il y avait un gamin là. Je maudissais Max pour le coup. Il ne peut jamais rester en place cinq minutes et surtout ce n'était pas le moment. Zander avait pensé à Peter. Raté. Parents débiles. Pourquoi pas. « Il n'y a que son père qui est un crétin fini. » Max arrivait, timidement pour une fois. Il s'approcha de moi pour commencer à tirer sur ma jupe. « Maman, j'ai faim. » Il l'avait lâché, ce foutu mot. En regardant la pendule je m'aperçus qu'il aurait été l'heure pour lui de dîner. Je ne pouvais plus faire machine arrière. Je me dirigeais vers le comptoir. « Tu as raison, il faut qu'on parle. » Fis-je à l'attention de Zander. Max me suivait sur les talons. « Tu veux quelque chose aussi Zander ? » J'aurai bien aimer lui offrir une tarte mais en pleine tête, mais il fallait que je reste un minimum cordial. Je pris une assiette avec une part de gâteau au chocolat et j'y mis une cuillère avant de donner l'ensemble à Max qui allait s'asseoir sur la banquette de la table où Zander était appuyé depuis un long moment.